Le jour où j’ai appris à dire non



J’ai longtemps été celle qui disait oui. Même si ça ne me tentait pas, même si je ne le sentais pas, je disais oui. Pour être gentille, pour ne pas déranger, pour ne pas déplaire. Parce qu’un non était beaucoup trop souffrant. Un non faisait instantanément monter en moi un cocktail de culpabilité, d’angoisse et de remords. Puissance 1000. Un mélange qui me faisait plaquer du cou et qui m’était intolérable. Je préférais donc mettre le bouchon là-dessus et dire oui. Je pensais que c’était un bon « deal », que d’acheter la paix, éviter les conflits, c’était une bonne idée. Jusqu’à ce que je fasse un burnout. Évidemment, y’a un paquet de facteurs qui m’y ont menée, mais ne pas savoir mettre mes limites en faisait partie intégrante. À 33 ans, je réalisais que je ne me connaissais pas. À force de dire oui et de ne pas m’écouter, j’avais perdu le contact avec moi-même. Mon intuition n’était plus qu’un faible murmure que je n’entendais, de toute façon, même plus.

Puis un jour, j’ai compris que c’était normal qu’un non, un « mettage de limite », vienne avec son lot de désagréments. Et que, bien que ça soit inconfortable, ça allait passer, c’était temporaire. Encore mieux: plus je le ferais, moins l’angoisse monterait à chaque fois.

J’ai donc commencé lentement. Par des p’tites affaires sans conséquence. Par exemple, un mauvais service au restaurant. Avant je n’aurais rien dit et laissé quand même un bon pourboire. Là, j’osais le dire (très doucement avec des gants blancs jusqu’aux coudes!), mais au moins j’exprimais enfin ma pensée! J’ai réalisé aussi que par écrit, j’étais meilleure pour trouver les bons mots. Parce que j’avais le temps de réfléchir et de corriger mon texte jusqu’à ce qu’il exprime clairement ma pensée. Donc les premières fois, ça été beaucoup par email. Et quand je me faisais prendre au dépourvu par quelqu’un, à qui je devais dire non de vive voix, j’avais une stratégie de secours: je lui demandais un temps pour réfléchir en lui disant que je lui reviendrais plus tard. Ainsi, les émotions avaient le temps de redescendre, je prenais le temps de voir si ça faisait « oui » ou « non » en-dedans et de trouver les bons mots. Et, comme on me l’avait dit, plus je l’ai fait, plus les signaux sont redevenus clairs. Pour moi, un oui, ça résonne plein de joie en-dedans, un feu d’artifice de confettis et de bonheur au coeur! (Vous comprenez l’image?) Alors qu’un non me tord l’estomac à l’envers, me donne des papillons de nervosité au ventre. On l’a tous ce baromètre là, c’est juste qu’on n’est pas habitué de l’écouter.

C’est ainsi que parfois j’ai pris des décisions qui ont pu avoir l’air complètement irréfléchies aux yeux des autres. Quitter un emploi payant, qui paraissait prestigieux, mais qui me rendait profondément malheureuse. Mettre fin à des amitiés, parce que je ne m’y sentais pas respectée. Rien de tout ça n’est facile et je mentirais de dire que je l’ai fait sans être attristée ou apeurée. Mais j’ai réalisé que rester dans une situation ou dans une relation qui me fait monter l’anxiété ou la culpabilité, c’était de toute façon voué à l’échec. Acheter la paix ne fait que reporter le problème à plus tard. Aussi bien s’écouter et s’épargner des souffrances inutiles. Après tout, on veut tous être heureux non? Et bien je pense que le premier pas pour y arriver, pour attirer les gens ou les situations qui nous rendent heureux, c’est d’apprendre à dire non.

Bonne pratique!

Julie

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